Donnerstag, 14. August 2014

CÉZANNE LES TRESORS DE LA PEINTURE FRANÇAISE

PAUL CÉZANNE 1839-1906 GRANDS ARBRES AU JAS DE BOUFFAN Peint entre 1885-1887

AUX SOURCES DU GENIE DE CÉZANNE
Parmi les très rares artistes de génie, Cézanne est l'un de ceux chez qui l'on ait le moins de difficultés
Découvrir les sources de cet élan créateur qu'est le génie. A de rares exceptions près, ceux qu´on appelle les grands artistes, les Maitres du Passe et du Présent, ne sont pas des créateurs.
Ils ont seulement l'élan. Et ce n'est que le talent, le talent d'origine intellectuelle. Pour l'artiste dit de talent, l'art est l'objet d'un désir plutôt qu'un besoin. L'artiste doué seulement de cette impulsion décidée ne peut se passer de la toile de fond de l'histoire de  l'art. Il invoque surtout la connaissance du passe, la science des règles établies, et l'Habileté tiendra brillamment la place de  l'imagination sensible.
Point d´inspiration intellectuelle chez Cézanne seule, l'inspiration sensible. Cézanne a pour ainsi dire ignore l'art des autres et ses conventions collectives. Les musées durent, J'en suis sur, l'éberluer, le dérouter, plus qu'autre ont chose. Son vieux fonds chrétien pratique qui lui faisait dire : « Je suis faible dans la vie, il vaut mieux que je m'appuie sur Rome », l’attira plutôt vers sa Cathédrale de Saint-Sauveur.  De sorte que des l’origine de ses aspirations il ne pouvait être question pour lui de « refaire l’art », il ne pensa jamais devenir un pré ou un néo quelque chose, non plus qu’il n’imagina ce que pouvait être une Renaissance. À son ignorance à peu près universelle s'opposa une incommensurable sensibilité. Si bien que lorsqu'il parlait des Maîtres, il disait généralement, suivant des mots genre historique, les calembredaines les plus aventureuses. C'est qu'il était arrive, lui, en sabots dans l'histoire de la peinture. Parvenu, mais parvenu magnifique, il n'hésite jamais à faire flèche de tout bois. Mais parce que ce tout était peu de chose, sont œuvre demeure essentiellement ce quelque chose fait avec rien qui est le propre de la création.
L'exemple cézannien, par ailleurs, n'est pas celui d'un fou, puisque pas unique. J'ai vu chez le douanier Rousseau une collection de numéros du « Petit Journal Illustré », dont le vieil artiste copiait avec application les grandes pages coloriées. Cézanne, lui, imitait aussi bien les images du « Journal des Demoiselles » que Lancret ou l’âpre Daumier. C'est que ces mixtures bizarres sont le plus souvent à la base des découvertes de laboratoire que sont les trouvailles de génie.
Et faudra-t-il pour s'en convaincre citer pour mémoire les prodigieuses inventions des XI et XII siècles, et ces miraculeux sanctuaires surgis de quelques humbles images syriaques ou byzantines ? Curieuse faculté de l'imagination : non pas faire fructifier un capital acquis par d’autres, mais en créer un nouveau ! Avantage si pratique, en somme, de la vertu, amoralité fructueuse de l'hygiène, retentissement assez révolutionnaire et bien surprenant de l'obéissance à cette loi naturelle du renouvellement de la vie, surtout si l’on remarque le peu de rayonnement fécond, sinon brillant, des Renaissances italienne et française que, elles, construisirent de toutes pièces comme une sorte de religion dont tous les éléments avaient été entièrement empruntes à une antiquité copieusement découverte. Renaissance : magnifique corps sans âme, devenu à son tour modèle si facile à pousser aux confins de la perfection, c’est-à-dire aux frontières de la décadence.
Qu’est-il advenu de la Renaissance, sinon le culte facile et collectif du procédé, et pour finir sans finir, la mélancolique vis sans fin de l'Académisme.
Quelle leçon au contraire a tiré des enseignements sensibles de l’inspiration individuelle. L'histoire de l'art est une vaste religion organisée. Le talent y vient puiser ses ressources à la petite semaine, comme la petite piété vient demander à Dieu une fois la semaine, aussi, son aide dominicale. Le génie cézannien enseigne qu'à côté de la foi de tout repos de l'art collectif il y à soit une sorte de mysticisme, cas de Cézanne, soit la foi du charbonnier, celle du douanier Rousseau. Dans l'antiquité, la poésie avait magnifiquement installe sur l'olympe des dieux parfaitement inaccessibles et soigneusement catalogues. Par contre la véritable foi, la vraie, s'inclinait devant les petits dieux lares de l’intimité, de l’individualité. Au moyen âge le Dieu collectif des Peres de l’Eglise, des hagiographes e des théologiens échappaient totalement au peuple qui se trouvait plus près des saints locaux qu’il créait à l’échelle de sa sensibilité. Ou bien, ce Dieu inaccessible, d'autres, franchissant les règles de l’orthodoxie, le cherchaient dans leur cœur : c’était les Mystiques et les Hérésiarques. Il n'est pas jusqu’aux nègres qui n'aient effectué cette tentative de réaction de l’instinct individuel contre le caractère collectiviste des religions. À côté des rites séculaires de leurs divinités officielles institués au seul profit de la famille, c'est à la magie que le noir a recours pour demander ce qu’il sait bien que la majesté surhumaine de la divinité ne lui accordera jamais.
C’est dans ce sens que le génie fruste et profond de Cézanne s’élabora lentement, sourdement, à l'ombre, bien noire pour lui, d’un art trop solennel, dans l’intimité de ses conceptions mystiques ou magiques, dans ce besoin naturel e premier de poser des formes colorées sur la toile, qu’on appelle peinture. Le secret du génie de Cézanne, on le trouverait en le situant dans une période qu’il faudrait appeler celle du bois taille. Ce génie fleure bon les armoires de chêne majestueuses et parfumées, les piles de linge de toile tissée à la maison, la raideur des blouses empesées de frais, la cuisine odorante qui n'a pas été livrée par quelque Potel et Chabot, c’est-à-dire tout ce qui a été fait pour soi, et par soi, dans un chez soi qu’on a eu la chance délire dans l’ignorance du tout fait, du tout cuit, des grands magasins de l’Art.
Avec si vous voulez un peu, et même beaucoup, de la divine et sublime bêtise martyrs, des anachorètes, des fakirs et des saints.

PAUL CÉZANNE 1839-1906 FEMME À LA CAFETIÈRE peint entre 1890 et 1984

PAUL CÉZANNE 1839-1906 BAIGNEURS Peint entre 1892 et 1894

PAUL CÉZANNE 1839-1906 PORTRAIT DE VALLIER Dernier portrait peint par CÉZANNE 1906
PAUL CÉZANNE 1839-1906 POT DE FLEURS SUR UNE TABLE Peint entre 1882 et 1887
PAUL CÉZANNE 1839-1906 VASE DE FLEURS ET POMMES Peint entre 1883 et 1887
PAUL CÉZANNE 1839-1906 PORTRAIT DE MADAME CÉZANNE Peint entre 1885 et 1887
CÉZANNE
LES TRESORS DE LA PEINTURE FRANÇAISE
EDITIONS D'ART ALBERT SKIRA GENÈVE
TEXTE DE 
MAURICE RAYNAL








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